Le match d'improvisation théâtrale - Olivier lecoqLe match d'improvisation théâtrale Le match d'improvisation théâtrale - vote

Au même titre que les règlements, la définition des rôles est fondamentale. Chaque intervenant dans le match agit dans le cadre précis de ce que lui autorise le Match en tant qu’institution. En d’autres termes, le match définit par lui même le rôle et le champ d’action de chacun.

Dans le match, je ne joue pas à être. Je suis. Je ne joue pas l’arbitre, je suis l’arbitre. Je joue à un jeu dans lequel je suis arbitre. Cela ne m’empêche pas d’incarner un personnage qui n’est pas moi-même, mais ce personnage n’est en aucun cas une caricature d’arbitre, car mon rôle au sein du match n’est pas caricatural. Seul le joueur, dans les improvisations peut jouer à être, car tout autour de lui contribue à construire l’espace dans lequel va s’élaborer la fiction. Mais le cadre de la fiction n’est pas fictif.

Cela provoque souvent bien des confusions, tant chez certains joueurs débutants que chez les détracteurs du match. Le match d’improvisation n’est pas une caricature du sport. Même s’il utilise le sport comme “emballage”, le Match est un jeu, qui répond à ses propres règles. Caricaturer ces règles équivaut à ne pas les respecter, et donc à nier leur sens profond.

Les acteurs du match se répartissent en trois groupes:

LE STAFF

Le Staff est constitué des acteurs qui organisent le cérémonial: l’arbitre, les deux assistants arbitres, le maître de cérémonie et le musicien (ou le groupe de musiciens). Chacun a un rôle bien spécifique, toutefois ils concourent tous les cinq au même objectif: cadrer le spectacle. Par conséquent, il doit y avoir entre eux une certaine solidarité, une vraie complicité, et surtout une parfaite impartialité vis à vis des deux équipes. Leur nécessaire neutralité doit accompagner tous leurs faits et gestes, car il doivent maintenir l’équilibre de toutes les forces en présence. Ils peuvent communiquer entre eux par la parole, mais le plus souvent ils communiquent par des gestes codifiés.

Il est important de comprendre que le Staff est au service du spectacle, et non l’objet du spectacle. Sa sobriété ne peut que renforcer son efficacité. Malheureusement, la tentation est souvent trop forte, surtout chez les amateurs, d’outrepasser les limites des différents rôles et d’en rajouter, de cabotiner, et donc de montrer sa frustration de ne pas être à la place des joueurs. Nous avons ainsi pu voir des musiciens chanter à tue-tête, des maîtres de cérémonie déguisés en bonne soeur, ou des assistant-arbitres avec des oreilles de Mickey. Ces élucubrations n’ont jamais eu que pour effet de brouiller l’attention du public, de fausser les équilibres, et finalement de nuire au spectacle. La qualité du match va généralement de pair avec la discrétion du Staff.

Le match d'improvisation théâtrale - Bruno BodinL’arbitre

“L’arbitre est le maître absolu du jeu” (cf. Art. 11 des règlements). Il fait appliquer les règlements, et dispose d’un arsenal de fautes qu’il peut siffler à tout moment. Il incarne la justice et la loi. Il est le juge et est garant de tous les équilibres. Il est le personnage central du jeu, aussi bien réglementairement que matériellement (il passe tout le match dans la patinoire). Mais si sa légitimité tient sa source dans les règlements, son autorité repose essentiellement sur son sens de l’analyse, et sa capacité à incarner cette légitimité. C’est pourquoi il ne peut se contenter de jouer à l’arbitre. Son pouvoir d’autorité n’est pas incarné par son comportement mais par la pertinence des fautes sifflées et l’explication qui en est donnée, ainsi que la relation juste et sereine qu’il instaure avec les joueurs et le public. Il doit être capable de contrôler tous les débordements, et toutes les tensions, quitte à catalyser sur lui les diverses formes de violences. Ainsi en attisant parfois l’excitation du public, il permet à celui-ci de se décharger sur lui et sur ce qu’il incarne. Par ses hurlements (ou parfois ses chaussons), le public se libère de toute ses tensions sur l’arbitre, ce qui désamorce une éventuelle violence vis à vis du joueur, qui ne provoquerait que la frustration de ce dernier, et contribuerait à instaurer un climat douloureux.

De ce fait, l’arbitre n’est pas fatalement hargneux, teigneux, et n’a pas forcément “l’air méchant”. Il existe des arbitres aimables, voire souriant. La seule limite étant le rapport de connivence qu’il peut instaurer avec les joueurs, car il doit garder une certaine distance vis à vis de ce qui se joue dans la patinoire, notamment sur son contenu, pour assurer sa neutralité et son autorité. Il est d’ailleurs bon de noter ici, qu’à aucun moment l’arbitre n’intervient sur le fond et le sens de ce qui est exprimé dans l’improvisation. Il est là pour contrôler la forme. Toutes les fautes qui sont à sa disposition, ne sont que des fautes de forme. Le joueur peut dire et faire ce qu’il veut dans la mesure où il respecte les règles. Il est donc dangereux pour l’arbitre de s’amuser du jeu des comédiens, de leur facéties, de leur débordements, car il peut se trouver piégé dans une complicité qui ne peut que nuire à son impartialité et au sens de sa mission. On remarquera que la plupart des arbitres emploient le vouvoiement dans l’explication des capitaines.

Dans le cas de matchs juniors, ou de matchs amateurs avec des joueurs débutants, l’arbitre doit avoir une autre compétence. Il doit être pédagogue. Entendons par là qu’il doit être à l’écoute des angoisses des joueurs, et qu’il doit veiller à la justesse de son analyse, car chaque faute sifflée revêt une dimension dramatique plus forte. Ses fautes doivent être expliquées de façon à permettre au jeu de s’améliorer, tout en rassurant le joueur sur ses capacités à dépasser ses propres limites. L’arbitre doit réussir à quantifier le nombre de fautes sifflées. Trop de fautes sifflées tuent le jeu et découragent le joueur. Plus le joueur est débutant et plus l’arbitre devra cibler ses fautes. Enfin, il doit avoir un rôle avant et après le match pour désamorcer d’éventuelles rancoeurs et ré-expliquer à froid le sens de ses interventions. Cela permet au joueur débutant de vivre sereinement ses premières expériences.

Rappelons que l’arbitre est l’auteur des thèmes du match, et que de ce fait il impulse les histoires qui seront jouées. Par conséquent il a une responsabilité artistique importante car la nature de ces thèmes doit pouvoir ouvrir le plus largement possible à un imaginaire fécond. C’est à lui de jauger le nombre de catégories ainsi que leur nature en fonction du type de match. Cela lui impose d’avoir une culture théâtrale à la hauteur des exigences qu’il impose, car le crédit indispensable que les joueurs doivent lui porter sera lié à son juste ressenti, à son impartiale perception. Il gère également le vote du public et est donc garant de son bon déroulement.

L’arbitre est sans conteste le personnage le plus important du match, même s’il n’est pas là pour briller aux yeux du public. C’est un rôle particulièrement difficile et qui demande une certaine expérience. Il est la clef de voûte de tout le spectacle, celui qui tient les rennes et contrôle les énergies. Il doit être capable de contenir et de maîtriser à lui seul toute l’énergie du match. A la fois juge, professeur, metteur en scène, directeur d’acteurs, il règne dans la patinoire par la seule confiance que lui portent tous les autres protagonistes, ainsi que le public. Quand le match se passe à merveille, que les joueurs s’épanouissent dans un jeu construit et imaginatif, et que le public se régale de toutes leurs incartades, l’arbitre s’efface humblement et laisse la place au spectacle. Ce n’est qu’après qu’on se souvient qu’il fut là, et que tout tenait debout grâce à lui.

Il est habillé d’un maillot rayé et a à sa disposition un sifflet pour marquer tous les temps et pour demander l’attention de tous, un Gazou pour siffler les fautes, et un palet pour tirer au sort l’équipe qui aura la main lors des comparées.

Le match d'improvisation théâtrale - assistantLes assistants-arbitre

Les assistant-arbitres sont indissociables de l’arbitre, car ils sont à son service. En dehors du fait qu’ils assistent l’arbitre à tout moment, il leur incombe un certain nombre de tâches pratiques.

Ce sont eux qui remplissent la feuille de match. Ils gèrent le panneau de score et le tiennent à jour. Ils surveillent l’équipe qui joue en second lors des improvisations comparées, et signalent les infractions à l’arbitre en jetant dans la patinoire un ruban de la couleur de l’équipe. Ils ramassent les chaussons qui ont été lancés dans la patinoire. L’arbitre fait appel à eux lorsqu’il s’agit d’expulser un joueur et de le renvoyer dans les loges. Enfin ils participent à la procédure de vote.

Au même titre que l’arbitre, ils se doivent d’être d’une neutralité totale et de garder une certaine distance vis à vis du jeu. Ils n’ont pas accès à la parole, sauf quand l’arbitre les interroge lors de la procédure du vote. Au moment du vote, ils sont autorisés par l’arbitre à entrer dans la patinoire. Une fois les cartons levés, l’arbitre se tourne vers l’assistant qui se trouve du coté de l’équipe qui semble être majoritaire pour lui demander si la couleur du vote lui semble dominante. Si il est d’accord, il crie “Majorité!”, si il n’est pas d’accord, il baisse la tête. Dans ce cas, soit l’arbitre décerne malgré tout le point, soit il fait procéder au comptage. Si il y a comptage, chaque assistant compte les cartons de la couleur de l’équipe qui est du même coté de la patinoire que lui. A la fin du comptage, l’arbitre demande les comptes et attribue le point. Pour le comptage, les assistants doivent être très rapides pour ne alourdir le rythme. Ils doivent être d’accord sur la méthode car si le comptage n’est pas crédible, c’est tout le match qui est discrédité. Dans les tournois officiels, on compte réellement carton par carton.

Les assistants ont donc un rôle d’exécutants. Au même titre que les joueurs, ils sont sous l’autorité de l’arbitre et leurs éventuels débordements peuvent mettre en péril l’arbitre lui même. Ils ont donc un devoir de discrétion et de servilité, ce qui ne les empêche pas d’avoir un personnage, si celui ci n’interfère pas dans le rôle qui leur est assigné.

Le match d'improvisation théâtrale - Gilles DumontLe Maître de cérémonie

Le Maître de cérémonie est en premier lieu le Maître du temps. Il contrôle les chronomètres, et donne à l’arbitre les décompte durant les improvisations (l’index levé = une minute, les deux index croisés = trente secondes, la main ouverte = dix secondes, et un doigt se replie pour chacune des cinq dernières secondes). C’est lui qui déclenche les sirènes de début et fin de période.

Le Maître de cérémonie est aussi et surtout le médiateur du match. Il est le seul à avoir l’autorisation de parler en dehors des temps d’improvisation, et il est même le seul à détenir les moyens techniques de communication, puisqu’il est généralement le seul à avoir un micro (dans certaines grandes salles il y a une reprise son générale, et il arrive que l’arbitre ait un micro cravate, toutefois le Maître de cérémonie est le seul à avoir officiellement, et à chaque match, un micro à main). C’est lui qui fait la “traditionnelle interview des capitaines”, à la manière des commentateurs sportifs de fin de match, et qui (à l’origine mais cette pratique s’est un peu perdue), introduisait le match par un éditorial qu’il lisait avant l’échauffement des équipes.

La plus grande responsabilité du Maître de Cérémonie est celle de maintenir le rythme du cérémonial. Il se doit d’être clair, précis et concis dans ses commentaires, tout en insufflant une certaine énergie. Il doit aller vite dans l’énoncé des fautes, et bien enchaîner ses relances.

Il n’a pas de tenue réglementaire, mais la tradition veut qu’il soit en smoking pour les hommes, ou en robe de soirée pour les femmes. Il est en tout cas impératif qu’il n’ait pas un costume qui dénature sa fonction (le déguisement de “bonne sœur” en est un triste exemple). Au même titre que l’arbitre, il est là au service du match, et n’a pas pour vocation de jouer un personnage. Il est Maître d’une Cérémonie, celle qui se passe devant nous. Là encore, il ne joue pas à être Maître de cérémonie.

Il est important que l’arbitre et le Maître de Cérémonie soient en harmonie, car leurs responsabilités sont complémentaires. Le Maître de Cérémonie est d’ailleurs le seul personnage qui ne soit pas sous le contrôle permanent de l’arbitre, dans la mesure où il a une certaine liberté de parole. Ceci étant, il doit former avec l’arbitre un duo homogène. D’ailleurs, on notera que les arbitres aiment bien travailler avec les mêmes Maîtres de Cérémonie, avec qui une certaine complicité et une confiance sont déjà instaurées.

Le match d'improvisation théâtrale - Didier MasseinLe Musicien

Le musicien a, dans le match, une place très particulière, et ce pour plusieurs raisons. Tout d’abord, c’est en général celui qui est le plus à l’écart dans l’organisation spatiale. De plus, c’est en général le seul qui ne soit pas comédien. Les autres protagonistes ont souvent déjà tenu d’autres rôles. Ainsi, les Maîtres de Cérémonies ont déjà été joueurs, certains joueurs ont déjà été assistants arbitres, certains assistants ont déjà été arbitres, etc... En ce qui concerne le musicien, il est très rare qu’il prenne parfois un autre rôle. De ce fait, il est souvent considéré comme un spécialiste qui apporte son concours au spectacle

Dans le match, le musicien est sous la conduite du Maître de Cérémonie et de l’arbitre, dans la mesure où il contribue à maintenir le rythme du spectacle. Il ponctue les différentes phases du cérémonial par de très courtes phrases musicales. Il doit être rapide, démarrer au “quart de tour”, et jouer des musiques vives et gaies. Son dynamisme contribue à garder les joueurs et le public en énergie. C’est lui qui ouvre les festivités et qui les ferme, car il est le premier à entrer en scène et le dernier à sortir.

L’usage du musicien vient lui aussi du hockey. Dans les matchs de hockey, il y a un organiste qui joue dés l’entrée du public, et qui intervient dés qu’il y a un arrêt du jeu.

Depuis, le musicien a parfois été remplacé par un groupe. Les résultats peuvent être formidables comme catastrophiques. Pour un groupe, la rigueur doit être encore plus grande, car les musiciens doivent être capables de partir ensemble très rapidement, au simple signe du Maître de Cérémonie. Ils doivent avoir la souplesse d’un musicien seul. Mais quand ça fonctionne et que le groupe est en parfaite osmose avec tout le Staff, le spectacle prend alors une autre dimension. Si le groupe n’est pas à la hauteur, ça “plombe” irrémédiablement le rythme, et le cérémonial s’en trouve très affecté. D’autres fois, et le plus souvent par facilité, le musicien est remplacé par un Disc-Jockey. Le résultat peut être concluant, mais reste le plus souvent impersonnel, car le DJ n’a pas toujours la présence scénique souhaitable. D’autre part, il a beaucoup moins de souplesse dans ses interventions.

Rappelons, ici encore, que le musicien est au service du spectacle, et qu’il doit accepter la frustration de ne jouer que des phrases de quinze ou trente secondes. Il n’est pas en concert et ses solos endiablés n’intéressent que lui. Avec le Maître de Cérémonie, il est le seul à pouvoir s’habiller comme il veut. La sobriété et l’humilité sont là aussi des moyens de mettre en avant le jeu des joueurs.

LES ÉQUIPES

Les équipes constituent les forces vives du spectacle. Ce sont elles qui vont remplir l’espace libre qui est mis à leur disposition.

L’équipe est, en tant que groupe, une entité forte. Elle représente une ville, une région, un pays, ou simplement une couleur qui à elle seule, peut constituer l’élément fondateur de son identité. Ce groupe, qui se doit d’être très uni, rassemble des personnes qui ont le plus souvent une histoire entre eux. Cette histoire s’est forgée bien au delà du match en lui même. Les équipiers s’entraînent, jouent, voyagent ensemble ce qui fait qu’ils ont une relation privée, qui se concrétise dans la patinoire par une certaine complicité de jeu. Cette complicité est souvent le moteur de la créativité collective. Il est d’ailleurs assez frappant de remarquer qu’un conflit interne à l’équipe transparaît forcément en jeu.

La rencontre de deux équipes est donc, avant tout, la rencontre de deux groupes, au sein desquels il y a une relation privilégiée. Dans certaines ligues, tous les joueurs se connaissent bien, et la complicité est générale, toutefois même dans ce cas, l’identité d’équipe reste primordiale, car elle reste un facteur de motivation pour le joueur et insuffle une concurrence dynamisante au delà des matchs. Qui n’a jamais assisté à ces saines rivalités entre équipes qui se caractérisent par ce jeu d’invectives qui prolonge la joute lors des dîners d’après match? Ce jeu là n’empêche en rien les retrouvailles des joueurs lors de matchs exceptionnels, matchs des étoiles, etc...

L’organisation au sein de l’équipe varie énormément d’une équipe à l’autre, dans la mesure ou celle ci s’organise selon les propres personnalités qui la composent. Les règles du match n’imposent rien d’autre à l’équipe que sa composition (trois garçons, trois filles, un coach et la désignation d’un capitaine et d’un assistant capitaine). De ce fait, les relations de pouvoir, l’attribution des rôles, la relation homme/femme ne regardent que l’équipe.

Le match d'improvisation théâtrale - Barrier, BajouLe Coach

Le coach est sans conteste le personnage dont le rôle est le plus mystérieux, car sa définition échappe totalement aux règlements. En tant qu’entraîneur, il est censé dirigé l’équipe, la préparer au match, lui donner des conseils. Pendant le match, on attend de lui qu’il donne un “coaching”, c’est à dire qu’il donne l’idée de base au joueur, pendant le caucus, et qu’il fasse les envois les plus judicieux pendant l’improvisation.

Dans les faits, sa place s’inscrit dans la relation au groupe qu’il dirige qui peut aller de celle du “Gourou” (maître à penser de l’équipe), à celle du coach “pot de fleur” (celui qu’on pose là parce qu’il en faut un). Ces deux extrêmes sont, à notre avis, loin d’être idéales, mais cela montre que rôle du coach est totalement dépendant de sa position dans le groupe.

Le rôle du coach, tel qu’il est institué au Québec, nous semble malgré tout être une bonne approche. On retrouve cette approche dans d’autres pays, mais c’est au Québec qu’elle semble être la plus généralisée. Il faut rappeler que, dans le pays de l’improvisation, on va généralement chercher les joueurs au berceau. Pour piloter ces jeunes recrues, on prend souvent un coach d’une génération antérieure. Ainsi, dans les polyvalentes (équivalent des lycées français), les coachs sont généralement d’anciens élèves et le plus souvent d’anciens joueurs. Il y a donc une relation hiérarchisée par l’âge. Même chose dans les CEGEP (équivalent du premier cycle universitaire français), et de fait cela se répercute jusque dans les ligues amateurs ou professionnelles. Les coachs sont généralement des anciens.

Le coach a donc généralement la force de l’expérience, et profite du respect des compétences. Il peut avoir une relation au groupe influente dans la mesure où son regard extérieur est appuyé par une capacité d’analyse éprouvée par le nombre de matchs qu’il a vus ou coachés. En bref, on l’écoute. Il nous semble important que le coach puisse jouir de cette écoute, et de cette place d’observateur privilégié, car les joueurs entre eux sont limités par les critiques qu’ils peuvent se faire, du simple fait qu’ils sont tous impliqués. Ils n’ont pas le recul nécessaire pour mettre en exergue les défauts de l’équipe et les améliorations à apporter. Il existe pourtant des équipes “autogérées”. L’autocritique y est plus compliquée car elle pourrait compromettre l’équilibre, et pousse les joueurs à rester dans un jeu, qui peut être de qualité, mais qui s’essouffle par le manque de remise en cause.

Un “bon” coach, en somme, n’est bon qu’au travers de la relation qu’il a instituée avec ses joueurs. Par conséquent, un “bon” coach dans une équipe, ne sera pas forcément un “bon” coach dans une autre équipe. On attend de lui qu’il ait des idées sur le banc, mais il doit être capable de guider l’équipe, de contrôler les énergies et gérer les relations internes, de critiquer, de rassurer, d’expliquer, de dynamiser, d’organiser, ... Bref d’être surhumain.

La place de coach-entraîneur est souvent la plus facile à gérer dans la mesure où il y a déjà une relation pédagogique qui est instituée au travers des entraînements. Et c’est souvent par le travail qui est fait en amont que le coach trouvera les mots justes pour charger son joueur avant de l’envoyer dans la patinoire.

Notons également que le coach dispose de quelques outils comme le chrono pour gérer le temps,  et le bloc notes ou l’ardoise qui lui permet de noter le thème.

Le match d'improvisation théâtrale - Ken ScottLe Joueur

Le principal rôle du joueur est de jouer. Cette Lapalissade nous permet de redire que tout ce qui encadre le match (cérémonial, règlements, fautes...), n’a qu’un objectif: permettre au joueur de jouer et d’improviser. Tous ces cadres institués pour lui, ne sont pas là pour lui apporter confort et mansuétude, mais bien pour favoriser sa prise de risque. Si on met un filet au trapéziste, c’est pour qu’il s’élance dans les airs, si on accroche un élastique au pied du sauteur, c’est pour qu’il se jette dans le vide. Tout concourt à créer les conditions de la mise en danger du joueur, car tout concourt à créer les conditions du spectacle: l’improvisation.

Le vrai problème dans le match d’improvisation (si tant est que ce soit un problème et non les prémisses de sa perte qui stimuleront sa force de survie ), c’est que tout concourt également à ce que le joueur profite de ces égards pour s’endormir dans le confort d’un jeu stérile et sans avenir. En fait, qu’il oublie de sauter dans le vide. La plupart des griefs contre le match en tant que spectacle tournent autour de cette critique.Et cette critique est, à notre avis, tout à fait recevable

Un joueur qui n’est pas en danger est un joueur qui dort, car il n’a plus ce besoin de survivre dans cet espace où, comme le disait Gravel “rien n’est fait pour lui, hormis l’obstacle”. Si il joue sans peur, c’est qu’il a verrouillé tous les accès de sa spontanéité et que celle-ci ne risque plus de le surprendre. Elle risque à terme de ne plus surprendre le public qui tôt ou tard découvrira la supercherie du cliché et de la facilité.

Tous les joueurs sont à la merci de ce syndrome. Tous les joueurs ont des ficelles, des principes, des “trucs”, des personnages fétiches, des façons de faire qui sont autant d’outils pour masquer leur moi profond. Ils occultent également leur force créatrice, qui peut les amener au ciel, mais aussi en enfer. Celui qui prend des risques peut s’envoler ou s’écraser, celui qui n’en prend pas ne s’écrasera pas, mais il ne décollera jamais.

Le match d'improvisation théâtrale - explicationsLe Capitaine

Le capitaine est un joueur. A ce titre, il joue le même rôle que tous les autres joueurs. Il a néanmoins une fonction protocolaire particulière. Il est le seul à être habilité à représenter l’équipe auprès de l’arbitre. C’est donc le seul qui peut venir demander des explications après l’énoncé des fautes, ou venir protester après une décision de celui-ci. Cela demande de sa part certaines capacités à jouer le jeu verbal qui s’instaure dans ces circonstances avec l’arbitre. Il se trouve également être celui que le Maître de cérémonie interrogera à l’issue du match. Il est le représentant officiel de l’équipe. En cas d’expulsion, il est relayé par son assistant. Au Québec, le capitaine porte un “C” au niveau du coeur, sur son maillot, et son assistant un”A”.

Au sein de l’équipe, le capitaine peut aussi avoir un rôle particulier à jouer. Il peut seconder le coach dans l’analyse du match, et faire le relais entre les joueurs et ce dernier. Souvent choisi parmi les anciens joueurs, il a aussi la force de l’expérience qui le place comme leader privilégié dans le jeu, car mieux à même de relancer l’improvisation, et sur le banc pour contribuer à dynamiser l’équipe.

LE PUBLIC

Le match d'improvisation théâtrale - voteLe public a une place primordiale dans le déroulement du match. C’est lui qui donne tout l’intérêt à l’enjeu, puisque c’est lui qui en détermine l’issue. A la fin de chaque improvisation, le public vote. Il est complètement partie prenante du spectacle, et contribue au déroulement de la partie. Il fait le score et par conséquent il influe sur le jeu des comédiens. Il y a encore un grand mystère sur le vote du public, car il est très difficile de percevoir, à travers la masse des cartons levés, la logique qui a guidé l’attribution du point à telle ou telle équipe. Certains votes sont clairs, d’autres déconcertent les joueurs car ils semblent contraire à la valeur que ceux-ci donnent à leur prestation. Certains votes sont parfois partisans, d’autres semblent justes, et d’autres encore démontrent que le public favorise telle forme de jeu plutôt que telle autre. Le vote est de toute façon souverain, car la globalité de tous les votes subjectifs donne l’objectivité du score. Nous noterons d’ailleurs que la procédure très rigoureuse du vote (tous les cartons doivent être levés ensemble, afin que les premiers votes n’influencent pas les indécis), contribue à faire du rôle déterminant du public, un rôle légitime. Là encore, on ne joue pas à voter. On vote parce que le jeu lui même en dépend. Nous ne sommes pas dans le simulacre ou la parodie. On ne fait pas semblant. Et le public ne s’y trompe pas, car il connaît intuitivement son rôle.

La participation du public ne se limite d’ailleurs pas au vote. Dés qu’il est dans la salle, le public est “dans” le match. C’est à dire qu’il est lié à l’événement qui va se jouer sous ses yeux, événement qu’il va vivre en direct, et qui le fera entrer dans une relation communicative avec l’ensemble des acteurs du spectacle. Cela se traduit par des cris, des rires, des applaudissements à tout moment d’éclat, des vociférations spontanées, des huées pour l’arbitre, et des pantoufles quand il y en a.

© Jean Baptiste Chauvin